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Un récit de vie : pourquoi, pour qui ?

    
Les souvenirs, autant de cailloux blancs sur le chemin de l'écriture de soi
    Écrire son histoire en vue de la faire partager ou de la transmettre est bien différent de la tenue d'un journal, où l'on n'écrit que pour soi, le plus souvent au jour le jour et en secret. À ce titre, qu'il soit partiel ou plénier, le récit de vie demande un travail préalable de réflexion et un certain recul sur les événements, tous deux garants de la structure et de la bonne articulation du récit. Très tôt, des interrogations essentielles pourront affleurer : « à qui souhaitè-je adresser le livre de ma vie ? », et encore : "quel est le sens de ma démarche ? ». La première étape, indispensable, de mon travail de biographe consiste dans la mise à jour de réponses à ces questions essentielles...

    En effet, on ne retracera pas de la même manière la vie d'un être cher auquel on souhaite rendre hommage, ou une biographie familiale inscrite sur des générations que l'on veut transmettre à ses descendants. Ensuite, la spécificité d'une vie n'est pas forcément inscrite dans sa chronologie : si pour d'aucuns l'enfance représente un paradis perdu ou le lieu d'une problématique essentielle, pour d'autres, le sens de l'existence sera plutôt lié à un événement-clef ou une expérience particulière vécu(e) ultérieurement et dont ils souhaiteront témoigner, parce que que cette étape de leur vie cristallise pour eux un aboutissement, un nouveau départ, ou au contraire un point de non retour. Ainsi, de la biographie familiale au témoignage social, il existe autant de formes de récits que de vies à écrire.

   Pourtant, si l'idée d'écrire est venue à l'esprit d'un grand nombre d'entre nous, l'obstacle de la page blanche semble souvent infranchissable : doutes quant à l'intérêt parler de soi, peur de ne savoir comment faire, ni par où commencer, crainte de ne pas être capable de traduire les événements dans un style suffisamment efficace, incertitude par rapport à ce qui peut décemment être dit, et la manière de le faire... Là encore, le biographe peut s'avérer un guide précieux. Son regard distancié met en lumière les choix pertinents susceptibles d'orienter le déroulement du récit, et ses questions incitent le narrateur à approfondir, ou à privilégier un aspect de son histoire particulièrement signifiant.

    Grâce à leur interaction constante, narrateur et biographe pourront ensemble effectuer un tri, adopter de nouveaux angles de vue, tisser des liens entre des éléments a priori épars ou décousus. Le biographe garantit un équilibre dans ce va-et-vient constant entre la parole et l'écrit, le  "je" qui raconte et celui qui fut... Ses interventions constituent autant de petits cailloux blancs déposés derrière soi, afin de ne pas aller se perdre hors des chemins de son histoire.