J’ai été récemment contactée Mme Claire Damay, documentaliste, et Mme Sylvie Warlop, professeur de Lettres et histoire et responsable de pôle de la section A.S.S.P. (Accompagnement Soins et Services à la Personne) au lycée Saint-Martin de Roubaix. Les deux enseignantes ont initié l’an dernier avec leurs élèves de 1ère A.S.S.P. un projet inédit autour du récit de vie...
Les élèves effectuent en
janvier un stage de trois semaines, en structure ou à domicile, auprès de
personnes non autonomes. C’est pendant la durée de leur stage, qu’ils sont
invités à recueillir le récit d’un patient, la particularité et l’intérêt
du projet résidant précisément dans son interdisciplinarité même : à la croisée de l’objectif
professionnel des lycéens et de leur maîtrise de la langue française.
« Le lycée Saint-Martin est, en effet,
étroitement associé au projet
Voltaire, explique Sylvie. Un projet ambitieux auquel M. Jean-Luc
Lambert, Directeur de l’établissement, tient à ce que tous les élèves de toutes
les classes, sans exception, puissent participer. Les élèves passent un
premier test en début d’année de seconde et bénéficient pendant leurs trois
années au lycée d’entraînements réguliers, avec des défis interclasses. Enfin, en
avril les Terminale et BTS passent la certification. »
« La rencontre, l’humain, sont privilégiés dans ce projet, ajoute l’enseignante avec douceur. Si le
récit de la personne est un peu décousu, ce n’est pas grave ; il en
rejaillira toujours un détail insolite, comme ce médaillon jalousement gardé
par une vieille dame, un souvenir d’enfance étonnamment précis, une émotion
toujours vivace… ». Un grand
nombre de thèmes sont ainsi abordés, comme les milieux sociaux, la guerre, les
voyages, les métiers, des drames… « On prend ce que donne la personne.
Certains récits sont très personnels, voire intimes. Qu’ils soient joyeux ou
bouleversants, aucun ne laisse indifférent ».
Afin de démarrer plus
facilement les entretiens et pour les guider, les lycéens ont à leur
disposition un questionnaire que leurs enseignantes les ont aidés à mettre au
point. Ils sont cependant libres de privilégier tel ou tel aspect de l’histoire
du narrateur sollicité, et mènent leurs entretiens à leur guise, sur plusieurs
séances courtes ou un temps plus long. Les adolescents sont également
préparés aux exigences de ce travail qui demande respect et rigueur, et où
l’anonymat des personnes doit notamment être préservé.
La démarche, tout en
privilégiant le lien entre les tout jeunes soignants et
leurs patients, restaure l’identité de
ces derniers en les replaçant au
cœur de leur propre histoire et de l’intérêt d’autrui : dès lors, la personne interviewée
n’est plus seulement « un patient parmi d’autres ». Et réciproquement : « Cette expérience est extrêmement
valorisante pour nos jeunes biographes, souligne Claire. L’an dernier, nous
avons organisé un concours et installé des porte-vue dans la salle des
professeurs. Les enseignants ont lu attentivement chaque récit, laissé des
commentaires… On pouvait également consulter les textes au CDI. Les élèves de
l’établissement ont été invités à voter pour celui qu’ils préféraient. ». Lors de la cérémonie de fin d’année, le
projet a été couronné par une remise de récompenses, au cours de laquelle le texte plébiscité (ici en PDF) a été lu publiquement par son auteur, Meïssane Hadhom.
Cette année, des
illustrations sont envisagées, ainsi qu’un atelier de rencontre et d’écriture
avec une biographe. J’ai donc la chance de pouvoir accompagner la deuxième édition
de ce beau projet auprès des 26
lycéens de la classe de 1ère ASSP – B et de leurs enseignantes chevronnées.
En attendant de pouvoir découvrir leurs écrits et entendre leurs retours sur
cette expérience tellement enrichissante, je leur souhaite à tous un excellent
stage, et de belles rencontres !